Madame Bovary
En avril 1856, après cinquante-quatre mois de
travail acharné, Gustave Flaubert met un point final au manuscrit de Madame
Bovary. Il a noirci plus de 3 800 feuillets, sans compter les brouillons : dix
pages en moyenne pour une page utile. Le texte est transmis à la Revue de Paris
dans laquelle il doit paraître en six livraisons, d’octobre à décembre 1856.
Dès sa sortie, l’histoire de cette fille de paysans – qui pour tromper son
ennui trompe son mari puis contracte des dettes – fait scandale.
Gustave
Flaubert a presque trente ans lorsqu’il se met à la rédaction du roman, en
septembre 1851. Il n’a encore rien publié. Pire ! Deux ans auparavant, il a
essuyé un cuisant échec auprès de ses deux meilleurs amis, Louis Bouilhet et
Maxime Du Camp avec La Tentation de saint Antoine. Flaubert les avait conviés à
Croisset pour une lecture de ce court drame philosophique dans lequel il
exposait ses conceptions de la vie. Après avoir psalmodié son texte, sans qu’on
ne l’interrompe une seule fois, quatre longs jours durant, le verdict était
tombé, sans appel : « Il faut jeter cela au feu et ne jamais en reparler. »
Flaubert l’a vécu comme une remise en cause de sa vocation d’écrivain, qui plus
qu’un rêve répondait à un choix de vie.
C’est
Bouilhet qui aurait soufflé à l’oreille de Flaubert l’histoire du ménage
Delamare, qui défraie la chronique. Dans le village de Ry, près de Rouen, se
raconte qu’Eugène, officier de santé, n’aurait pas survécu au fiasco de son
second mariage. Marié en premières noces à une femme plus âgée que lui, il
aurait épousé, une fois veuf, une certaine Delphine Couturier. Pour le meilleur
et surtout pour le pire ! Éconduite par ses amants successifs, ruinée par les
dettes contractées afin d’assouvir ses rêves de luxe, la jeune femme serait
morte précocement, laissant un mari brisé et une enfant en bas âge. L’idée de
cette tragédie bourgeoise n’est-elle pas l’occasion pour Flaubert de retrouver
le droit chemin du réalisme, du moins en apparence, et d’en finir avec la
tentation romantique ?
Avec
Madame Bovary, Gustave Flaubert devient l’écrivain dont il a toujours rêvé.
No hay comentarios.:
Publicar un comentario