miércoles, 18 de noviembre de 2015

La présence de Flaubert dans Madame Bovary

La présence de Flaubert dans Madame Bovary

Le principe de l’impersonnalité dans l’art

Chez Flaubert, « l’homme et l’œuvre » ne font qu’un. La Correspondance, ainsi que ces ouvrages de Flaubert qui ont trait à la vie contemporaine, est dominée par trois thèmes essentiels : la haine des valeurs bourgeoises, le culte de l’art et la doctrine d’impersonnalité. Tous les trois se reflètent dans Madame Bovary et s’expriment avec une force particulière dans les lettres de Flaubert qui accompagnent et éclairent la composition du roman. La question qui sera examinée dans cet article concerne la notion flaubertienne de l’impersonnalité artistique par rapport à la réalité qu’est Madame Bovary.
Deux affirmations qui figurent dans la Correspondance aux deux extrémités de la période où il fut pris par la rédaction de Madame Bovary permettent de saisir ce que Flaubert entendait par l’impersonnalité dans une œuvre d’art. En décembre 1852, quelque quinze mois après l’inauguration de ses travaux, Flaubert fit part à Louise Colet de sa conviction que « l’auteur, dans son œuvre, doit être, comme Dieu dans l’univers, présent partout et visible nulle part » (1). En mars 1857, à la suite du procès et de l’acquittement et juste avant la publication en volume du roman, Flaubert parla directement de Madame Bovary dans une lettre adressée à Mlle Leroyer de Chantepie. « Madame Bovary, lui avouait Flaubert, n’a rien de vrai. C’est une histoire totalement inventée ». Puis il ajoutait en des termes désormais familiers : « Je n’y ai rien mis ni de mes sentiments ni de mon existence. L’illusion (s’il y en a une) vient, au contraire, de l’impersonnalité de l’œuvre. C’est un de mes principes qu’il ne faut pas s’écrire. L’artiste doit être dans son œuvre comme Dieu dans la création, invisible et tout-puissant ; qu’on le sente partout, mais qu’on ne le voie pas » (2).
Flaubert était donc bien persuadé que Madame Bovary justifiait le culte qu’il vouait au principe de l’impersonnalité. En contestant cette conception, on cherchera à démontrer que la base qu’elle fournit au système esthétique flaubertien est minée par la réalisation créatrice de Madame Bovary.

Dans cet autre chef-d’œuvre, la Correspondance, Flaubert ne fait aucun effort pour cacher sa personnalité. En repérant les traits dominants de sa personnalité telle qu’elle s’affirme dans la Correspondance et en les confrontant avec le témoignage de Madame Bovary, on tâchera de reconstruire le portrait de Flaubert malgré lui qui se dessine au cours du roman.

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